dimanche 28 août 2005

FSSPX-Rome: accord ou pas accord?

C'est le sujet brûlant de la rentrée. C'est la question dont tout le monde parle en cette fin août. Internet crépite, les gazettes s'excitent, des milliers de personnes sont en transe. Non, chers amis, il ne s'agit pas des risques de scission au PS pronostiqués par Rocard, souhaités par Kouchner, de la zizanie chez les Verts qui comptent déjà six candidats à la prochaine présidentielle (qui dit mieux!), ni du verre de l'amitié bu par la triade des horreurs, José, Besancenot et Buffet à l'université d'été de la LCR, ni de la confirmation à Bordeaux de la cinquième candidature élyséenne de Jean-Marie Le Pen à septante-neuf printemps (quelle santé, chapeau l'artiste!), non, chers liseurs du FC, il s'agit de la rencontre le 29 août entre Mgr Fellay et Benoît XVI.

Puisque tout le monde y va de son grain de sel, Petrus se fait une joie et un devoir d'apporter sa modeste contribution.

D'abord, y aura-t-il accord? That is the question. Si cela ne tenait qu'à Mgr Fellay et à ses principaux collaborateurs (les abbés Sélégny, Baudot, Schmidberger), sans aucun doute, il se ferait. Certes pas à n'importe quelle condition. Mais contre la levée des excommunications, une libéralisation de la messe tridentine et la mise en place d'une administration apostolique pour la FSSPX qui lui permettrait d'échapper à l'Ordinaire, tout laisse à penser que le supérieur général de la Fraternité apposerait sa signature au bas d'un protocole d'accord.

Par ailleurs, qui ne voit que ce serait pour lui une façon de rebondir après sa gestion très critiquée de la crise laguériste et des départs toujours plus nombreux (bien que encore numériquement limités) de cette société sacerdotale? Alors même que son mandat de douze ans expire au plus tard en juillet 2006, Mgr Fellay apparaîtrait comme l'homme qui a régularisé canoniquement la situation de la FSSPX, trente ans exactement après la suppression administrative de cet institut le 6 mai 1975 et vingt-neuf ans après la suspens a divinis de Mgr Lefebvre par Paul VI. Au bout d'une génération de conflit, ce serait les grands retrouvailles entre la Rome post-Vatican II et l'organisation fondée par le prélat d'Ecône.

Ajoutons que la grande majorité des fidèles de la FSSPX, au moins en France (à l'étranger, cela semble moins vrai) souhaitent un accord avec Benoît XVI. Il faut dire que les publications officielles de la FSSPX, et notamment celles du district de France, se sont montrées jusque-là globalement favorables au successeur de Jean-Paul II.

Par conséquent, si un accord était finalement conclu, le plus probable est que la grande majorité des prêtres, et plus encore des fidèles, suivraient. D'ailleurs, de plus en plus de soutiens de la FSSPX n'hésitent pas à fréquenter occasionnellement des lieux de culte ecclésiadéistes quand cela les arrange, (tendance nettement renforcée depuis la crise de l'automne 2004) ce qui s'explique aisément dès lors que l'on considère comme eux que le combat est seulement ou d'abord celui de la messe.
Tous ces éléments plaident objectivement pour un accord.

Et pourtant, nous ne serions pas prêt à parier une villa sur la Côte d'Azur que l'accord se fera. Car il existe des obstacles qu'il ne faut pas se cacher ni minorer. Sont-ils de nature doctrinale? On nous le fera croire en cas d'échec des négociations mais il ne faut pas prendre pour argent comptant ces justifications a priori. En effet, si la FSSPX considérait comme absolument impossible tout accord avec des partisans résolus de Vatican II et de ses enseignements, elle ne nourrirait aucun espoir en Benoît XVI qui, il y a encore quelques jours à Cologne, s'est inscrit dans la parfaite fidélité à Jean-Paul II dans sa volonté oecuménique avec les protestants et son dialogue interreligieux avec les juifs (visités et honorés en premier, ce qui n'est pas un hasard) et les musulmans.

Non, vous pouvez en être convaincu, chers liseurs, s'il n'y a pas d'accord, c'est que Mgr Fellay, craignant une scission de l'aile droite de la FSSPX et la rébellion d'un ou plusieurs évêques, préférera sauvegarder l'unité de la structure à l'accord avec le Vatican. Plutôt le statu-quo juridique que l'éclatement de la Fraternité! C'est d'ailleurs, à mon sens, cette obsession de l'unité, de la survie, du maintien, de l'homogénéité (au moins de façade) de la FSSPX, confondue de fait avec l'Eglise, qui explique l'échec de toutes les tentatives d'accord depuis trente ans. C'était déjà vrai du temps de Mgr Lefebvre, cela reste vrai aujourd'hui. La FSSPX s'est mise dans une telle situation qu'elle ne peut ni glisser à droite vers le sédévacantisme ni se déporter sur la gauche vers le ralliement (même pudiquement déguisé en simple régularisation canonique) sans exploser en plein vol.

Mgr Fellay le sait. Il sait que, s'il y a accord, il y aura des pertes. Il y est prêt si elles sont minimes. Mais si la contestation gagne une minorité non négligeable des clercs et s'étend même, ne fût-ce qu'à un seul des trois autres évêques, on peut douter que l'accord avec Rome se fasse.

Car, pour qui connaît la FSSPX, l'on sait bien que les prêtres qui la composent ne sont à peu près d'accord sur rien, sauf sur le culte, légèrement infantile, voué au fondateur. Par exemple, je connais un prêtre, l'abbé Basilio Méramo, qui est prêtre de la FSSPX, actuellement en poste au Mexique, d'ailleurs très sympathique, tout en étant sédévacantiste complet. Il ne cachait pas que pour lui Jean-Paul II était l'Antichrist et il est évidemment non una cum au canon de la messe. A l'autre extrémité, l'abbé Didier Bonneterre, actuellement en poste à Paris à la chapelle Sainte-Germaine, ne pouvait s'empêcher dans la plupart de ses sermons dominicaux de dire tout le bien qu'il pensait de Jean-Paul II et de la nécessité d'être uni au pape. Le seul point commun entre les deux? Le culte qu'ils vouent à Mgr Lefebvre considéré par eux comme un saint. Et en effet comme le fondateur de la FSSPX a dit à peu près tout et son contraire, successivement mais aussi simultanément, selon les lieux et les publics, selon qu'il parlait à des journalistes ou à des fidèles, selon qu'il parlait à des "durs" ou à des libéraux, selon l'évolution de ses rapports avec Rome, selon l'intérêt de la structure FSSPX, les deux prêtres peuvent chacun à bon droit se réclamer de l'héritage moral, doctrinal et spirituel de l'archevêque qui les a fait prêtres pour l'éternité.

Bref, tout cela pour dire qu'il y a, pour faire simple, trois tendances au sein de la FSSPX :

-l'aile ouvertement favorable aux accords et au fond très proche des milieux ecclesiadéistes. C'était le cas de la quasi-totalité des laguéristes quand ils étaient encore au sein de la Fraternité. C'est, semble-t-il, le cas de Mgr Fellay et de ses adjoints et des principaux responsables du district de France.
_l'aile indifférentiste qui suivra sans états d'âme la décision finale, quelle qu'elle soit. C'est la grande majorité des troupes cléricales formées à l'obéissance et qui ne s'imaginent pas ailleurs qu'à la FSSPX, qu'elle soit ralliée ou non à Rome.
_l'aile hostile voire très hostile aux accords. Il y a bien sûr les dominicains d'Avrillé mais qui, il est vrai, ne sont pas membres de la FSSPX tout en s'inscrivant résolument dans la mouvance lefebvriste et en cherchant leurs ordinations auprès des évêques de la Fraternité. Dès l'avènement de Benoît XVI, ils ont publié deux plaquettes très hostiles au nouvel occupant du siège de Pierre et l'on imagine mal les voir accepter un accord qui contredirait presque quinze ans de combat dans leur revue doctrinale Le Sel de la Terre. Si accord il y a, ils seront selon toute vraisemblance à la tête de la résistance. Il y a aussi un certain nombre de prêtres qui ne suivront probablement pas. C'est à coup sûr le cas d'un abbé Vignalou, d'un abbé Meramo et de tous les crypto-sédévacantistes de la FSSPX.

Que fera un abbé Beaublat, un abbé Pivert? Difficile de choisir entre leur conviction profonde et leur fidélité à la structure FSSPX?

C'est là que la question des évêques devient déterminante : si un seul évêque résiste, l'on peut être sûr qu'il sera suivi par au moins quelques dizaines de prêtres sur les quelque 460 que compte officiellement la Fraternité. En revanche, si aucun n'ose se rébeller, on peut douter que les résistances ecclésiastiques soient nombreuses. D'autant que, et je dis cela sans mépris, l'aspect matériel compte. Lorsque l'on jouit du confort d'un prieuré, d'une voiture, du remboursement de l'essence au kilomètre, lorsque l'on est dans une oeuvre connue, étendue dans le monde entier et relativement prospère, il faut une sacrée dose de courage pour la quitter et aller dans la nature. D'autant que la quasi-totalité des chapelles appartient aujourd'hui à la FSSPX. Donc un prêtre qui quitte l'oeuvre se retrouve sans rien. S'il n'a pas une fortune personnelle, s'il ne peut pas compter sur le soutien de riches et dévoués bienfaiteurs, la situation peut être extrêmement difficile.

Si un évêque devait résister à un accord, beaucoup pensent que ce serait Mgr Williamson. C'est d'ailleurs ce que sous-entendent les gazettes et autres dépêches d'agence. Il est à peu près certain en effet que si résistance il devait y avoir, ce n'est sûrement pas de Mgr Tissier ou de Mgr de Galaretta qu'elle viendrait. Ils n'en ont ni le profil, ni le caractère ni l'envergure.

Cependant je ne parierai pas très cher sur la rébellion de Mgr Williamson. Il est homme à faire des déclarations tonitruantes, et généralement alambiquées (ce que ne suffit pas à expliquer sa nationalité britannique!) et puis rien ne se passe. La montagne accouche d'une souris. On l'a bien vu dans l'affaire laguériste où, après un sermon à Saint-Nicolas très virulent contre Mgr Fellay (jamais cité), il est complètement rentré dans le rang. Au moins extérieurement. Décevant ainsi les laguéristes après s'être discrédité auprès des fellaysiens.

J'ajoute que s'il devait être le chef de file de la résistance, sa crédibilité serait très entamée auprès des "durs" qui, pour la plupart, ont été à la pointe contre les laguéro-tanoüarniens et contre les positions sur la gnose des abbés Célier et de Tanoüarn. C'est notoirement le cas des milieux gravitant autour de la revue Sous la Bannière d'Adrien Loubier, de CSI de Louis-Hubert Rémy, de DPF de Jean Auguy et de La Politique de Philippe Ploncard d'Assac, même si la vérité oblige à dire, s'agissant de ces deux derniers, qu'ils ne sont pas par principes hostiles à un accord avec Benoît XVI.

En toutes hypothèses, la FSSPX est actuellement très fragilisée et, quel que soit le choix que fasse in fine son supérieur général, elle est dans une mauvaise posture. Soit elle ne signe pas l'accord proposé par Benoît XVI, auquel cas beaucoup de ses fidèles ne comprendront pas et rejoindront les milieux Ecclesia Dei, d'autant plus nombreux si la messe tridentine est "libérée". De même, les prêtres qui souffrent de moins en moins l'ambiance interne, en effet irrespirable, et qui ne sont pas fondamentalement hostiles à une régularisation canonique, profiteront peu à peu des solutions offertes par Rome. Ce ne sera peut-être pas une grosse hémorragie mais du goutte-à-goutte qui interdira toute expansion de la FSSPX. Laquelle déclinera irrémédiablement, même si elle subsistera comme structure pyramidale et autocentrée fonctionnant alors de plus comme une petite Eglise sans pour autant s'orienter vers le sédévacantisme.

Soit au contraire la FSSPX se rallie, et c'est toute une aile qui la quitttera. Minoritaire très certainement mais bruyante. Elle criera à la trahison du combat de Mgr Lefebvre comme si le prélat d'Ecône n'avait pas lui-même signé un protocole d'accord avec le cardinal Ratzinger le 5 mai 1988, dix-huit mois seulement après Assise et deux ans après la réception par Jean-Paul II sur le front du signe du Tilak.

Dans tous les cas, nous sommes à la veille d'un véritable carnage spirituel. Les familles vont à nouveau se diviser, s'invectiver comme au moment des sacres, comme au moment de la crise laguériste. Les accusations de traîtrise et de libéralisme d'un côté, d'intégrisme et de schisme de l'autre vont réapparaître. Des gens dégoûtés abandonneront tout. Les amis d'hier deviendront les ennemis de demain. L'atomisation et la neutralisation du courant traditionaliste est en voie d'achèvement. L'éclipse de l'Eglise est désormais totale. Nous sommes au Samedi Saint de l'Eglise militante.

Tout est humainement désespéré.

Petrus.

vendredi 26 août 2005

Apologie de Mgr Lefebvre

Bien sûr, Victor. Il y a même des textes faisant le panégyrique du nouvel Athanase du XXe siècle. 

Jugez plutôt ces deux textes d'un clerc de la FSSPX: 

Texte A : accord avec Benoît XVI. 
  
Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il. 

Mes biens chers frères. 

Gaudete in Domino : Réjouissez-vous dans le Seigneur. Oui, mes biens chers frères, jamais sans doute cette adresse de l'Apôtre Paul aux Philippiens n'a été aussi vraie qu'aujourd'hui. A n'en pas douter, nous vivons de grands jours. Une immense joie nous étreint. Une infinie reconnaissance aussi. La Tradition enfin reconnue par Rome, mes frères. La Tradition rétablie dans ses droits sans concession, sans faux-semblants, sans repentance. La messe traditionnelle hier outragée, piétinée, abusivement interdite, aujourd'hui libérée, aujourd'hui glorifiée. Le missel de saint Pie V enfin autorisé , mieux réhabilité, remis en honneur pour tous les prêtres catholiques qui souhaitent célébrer selon la messe de toujours, celle qui a sanctifié des générations entières, celle des saints, des apôtres, des martyrs, des confesseurs de la foi. 

Mais ce n'est pas tout, mes frères, le combat que nous menons depuis plus de trente ans est enfin reconnu. Les injustes excommunications qui freinaient notre apostolat, handicapaient nos missions sont levées sans aucune rétractation de notre part. Ah, chers amis, comme nous sommes heureux de nous retrouver cum Petro et sub Petro, dans la pleine et entière communion avec notre vénéré pape Benoît XVI. 

Dès son élection, un immense vent d'espérance s'était levé sur l'Eglise. Nous n'avons pas été déçu. Deo gratias. Le pape nous a reçu avec beaucoup de chaleur, de sympathie. Il nous a félicité pour notre attachement à la Tradition bimillénaire de l'Eglise et a souhaité que nous l'aidions dans sa tâche pour relever, redresser la barque de Pierre qui prend l'eau de toutes parts. 

Pouvions-nous refuser, biens chers fidèles, cette main tendue, cette voix suppliante du Souverain Pontife ? Quel catholique digne de ce nom pourrait rester sourd à l'appel du doux Christ sur la terre, au Père commun des chrétiens, à celui qui est la tête, le roc et le fondement de l'Eglise, qui a l'assistance du Saint-Esprit et le charisme d'infaillibilité, qui est la source de toute juridiction et le principe d'unité des catholiques ? 

D'autant que notre chère Fraternité Saint-Pie X conserve toutes ses prérogatives. Nous gardons intactes, mes biens chers frères, les chapelles de la Tradition et nous aurons bientôt des églises avec la pleine et entière autorisation de l'Ordinaire. Nous gardons les écoles de la Tradition avec leur rayonnement, et leur 98% de réussite au baccalauréat dont une majorité de mentions (les écoles FSSPX, ça marche !), nous gardons nos prieurés, mes frères, que nous avons construits, achetés, restaurés grâce à vos deniers, à votre générosité. Merci, bien chers fidèles, et surtout ne relâchez pas vos efforts. 

Mieux, nous sommes érigés en Administration apostolique ce qui nous protège des compromissions avec les modernistes, garantit notre spécificité liturgique et disciplinaire. Nous échappons au contrôle de l'évêque du lieu, ne dépendant que d'un cardinal nommé par le pape et chargé de la sauvegarde de nos intérêts. 

Cette victoire extraordinaire, inespérée il y a encore peu de temps, nous savons que nous la devons à notre vénéré fondateur, Mgr Lefebvre, le nouveau saint Athanase, le nouveau saint Pie X, le saint évêque prédit par la Vierge de Quito et sans lequel rien n'aurait été possible. 

Comment ne pas voir dans ce succès de la Tradition, bien chers fidèles, la puissante intercession de Mgr Lefebvre et comment ne pas voir pareillement un signe de la Providence dans cet accord avec Rome l'année même du centième anniversaire de la naissance de notre saint fondateur. 

Oui, mes frères, remercions Monseigneur, prions-le avec ferveur. C'est grâce à lui que cette reconnaissance pleine et entière de la Tradition a été possible. C'est le succès personnel du saint archevêque. Dédions-lui, offrons-lui cette victoire. Car c'est sa démarche qui a été couronnée de succès. Lui qui toute sa vie a été un évêque romain. Lui qui n'a jamais voulu rompre les liens avec Rome, au point de signer tous les textes de Vatican II, de prôner au concile l'abandon de la soutane et l'usage de la langue vernaculaire dans la liturgie, lui qui fut convaincu jusqu'à sa mort que Rome reviendrait un jour à la Tradition, que le Pape rétablirait dans tous ses droits la Tradition. Il n'a jamais douté, même aux pires heures de sa vie. Il a toujours voulu maintenir le contact avec le Saint-Père, demandant à ses prêtres de se dire en communion avec lui chaque jour au canon de la messe, de chanter l'Oremus pro pontifice lors des salut du Saint-Sacrement, de prier pour lui lors du chant de la litanie des saints, aux Rogations, à la veillée pascale, dans les prières liturgiques du Vendredi saint. 

Il a exigé de ses séminaristes qu'à la veille du sous-diaconat, du diaconat et du sacerdoce, ils signent par trois fois une déclaration de fidélité et de soumission à Jean-Paul II reconnaissant son autorité suprême sur l'Eglise catholique, son pouvoir d'ordre et de juridiction universelle et immédiate sur tous les clercs et sur tous les fidèles. 

Monseigneur a d'ailleurs rencontré Paul VI puis Jean-Paul II. Il a signé le 5 mai 1988 un protocole d'accord avec le cardinal Ratzinger et ce n'est qu'après beaucoup d'hésitations, et la mort dans l'âme, qu'il a dû retirer sa signature le lendemain après avoir passé une nuit blanche. Non pour des raisons doctrinales mais simplement parce que Monseigneur voulait être sûr que la Tradition fût rétablie dans ses droits. C'est pourquoi il voulait une date certaine pour la consécration de l'évêque, que par sécurité il voulait même plusieurs évêques et il tenait à avoir la majorité des membres dans la commission romaine qui devait s'occuper de notre tant aimée Fraternité. Et puis les tentes avaient déjà été louées pour le 30 juin. Pouvait-on décemment annuler une cérémonie alors que les gens avaient déjà réservé l'hôtel près d'Ecône? 

N'en doutons pas, mes biens chers frères, du Ciel où il règne en majesté avec Notre-Seigneur, la Vierge et les Saints, Monseigneur nous voit. Je suis sûr qu'il nous sourit. Rappelez-vous, mes frères, ce beau sourire de Mgr Lefebvre. C'était déjà un coin de paradis sur la terre. Comme il doit être heureux aujourd'hui. Quel grand jour pour lui, pour l'Eglise, pour Notre-Seigneur ! Quelle reconnaissance nous lui devons ! N'hésitez pas à appeler vos enfants Marcel. Nul doute qu'avec un tel saint patron ils seront protégés, bénis, exaucés ! 

Certes, comme toujours ici-bas, notre joie n'est pas parfaite. Quelques prêtres et quelques fidèles, heureusement peu nombreux, nous ont quittés, refusant cette réconciliation avec Rome. Il faut beaucoup les plaindre car ils mettent leur âme en grand danger. Ils sont schismatiques, ils sont excommuniés. Certains sont même tentés par le sédévacantisme, un poison épouvantable contre lequel nous n'avons cessé de lutter. Priez pour eux. Si vous en connaissez, essayez de les ramener au port de la vérité et du salut, au sein de notre chère Fraternité qui reste le roc sur lequel s'édifie l'avenir de l'Eglise, l'arche par laquelle la Tradition est conservée, revivifiée. 

Quelle grâce, mes amis ! Quelle grâce ! Remercions la Sainte-Vierge à laquelle Monseigneur vouait un culte particulier. Et saint Joseph, son très chaste époux. Et les saints anges qui se réjouissent avec nous dans le ciel. 

Gaudete in Domino : Réjouissez-vous dans le Seigneur. 

Au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il. 

Texte A' : absence d'accord avec Benoît XVI. 

 Au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. 

Mes biens chers frères, 

Judica Domine nocentes me expugna impugnantes me : apprehende arma et scutum et exsurge in adjutorium meum, Domine, virtus salutis meae ? Jugez, Seigneur, ceux qui me font du mal ; combattez ceux qui me combattent. Prenez vos armes et votre bouclier, et levez-vous pour me secourir, Seigneur, vous dont la force est mon salut. 

Comme elles sont d'une brîlante actualité, mes amis, ces paroles du psalmiste. Savez-vous que c'est là l'introït de la messe du lundi saint, le jour même où notre vénéré fondateur a rendu l'âme et est allé au Ciel, le lundi 25 mars 1991 ? 

Il faut relire les oraisons et les lectures de cette messe tant elles sont miraculeusement adaptées à ce que nous vivons aujourd'hui : " j'ai livré mon corps à ceux qui me frappent et mes joues à ceux qui m'arrachaient la barbe ; je n'ai pas détourné mon visage de ceux qui me couvraient d'injures et de crachats " écrit le prophète Isaïe. Et le graduel, mes frères : " Levez-vous, Seigneur, pour me rendre justice, mon Dieu et mon Seigneur, pour défendre ma cause. Tirez l'épée et frappez ceux qui me persécutent ". Et la secrète : " Arrachez-moi à mes ennemis, Seigneur ; je me suis réfugié auprès de vous ". Et la communion : " Qu'ils soient confus et confondus tous ensemble, ceux qui se réjouissent de mes maux ; qu'ils soient couverts de honte et de confusion ceux qui disent du mal contre moi ". 

Oui, mes frères, méditez bien ces textes du missel. Car le combat de notre vénéré fondateur n'est pas terminé. Le temps n'est pas encore venu d'une pleine reconnaissance de la Tradition par Rome. Au contraire, plus que jamais, nous avons affaire à la Rome néo-moderniste et néo-protestante que dénonçait Monseigneur. 

Pouvions-nous, mes frères, décemment accepter un accord avec un pape imbu de modernisme, de philosophie hégélienne, qui répète sans cesse qu'il continue l'œuvre de son prédécesseur, qu'il entend appliquer fidèlement Vatican II ? 

Mais cela, mes frères, nous ne pouvons pas l'accepter. Oserions-nous nous regarder dans une glace si nous avions cédé aux sirènes du modernisme, du ratzinguérisme ? Oh bien sûr on nous proposait la liberté pour la messe traditionnelle, on nous proposait de nous ériger en administration apostolique. On était prêt à lever notre excommunication. Oui, mais à quel prix mes frères ? Le silence sur Vatican II ! Le silence sur ces abominables et grotesques JMJ ! Le silence sur la visite à la synagogue de Cologne ! Sur la risette aux musulmans ! Sur l'œcuménisme avec les protestants, les anglicans et les orthodoxes ! Non possumus, mes frères. Nous ne pouvons, nous ne voulons avoir aucune part, nullam partem, avec les ennemis de Notre-Seigneur, ceux qui nient la virginité perpétuelle de la Sainte-Vierge, ceux qui nient la divinité de Notre-Seigneur, son Incarnation, sa Résurrection, ceux qui rejettent le Dieu trinitaire. 

Quelle différence, biens chers fidèles, y a-t-il entre Benoît XVI et Jean Paul II ? Le premier n'a-t-il pas été le principal et dévoué collaborateur du second pendant un quart de siècle ? N'est-il pas à l'origine de l'excommunication de Monseigneur ? N'a-t-il pas été à Vatican II l'un des théologiens les plus modernistes ? Et qu'est-ce que cette grotesque réforme de la réforme ? Nous voulons la messe tridentine sans arrangement, sans combinazione, sans combinaison sordide. De Dieu on ne se moque pas. 

Notre combat, notre mission historique, ce n'est pas seulement ceux de la messe. C'est d'abord et avant tout ceux de la foi, de la foi catholique, mes frères. Que nous défendons dans son intégrité. Dans sa pureté doctrinale. Sans tache. Sans aggiornamento. Sans habile synthèse hégélienne. 

Si nous avions signé l'accord que l'on nous proposait, en quoi aurions-nous été différents du Barroux, de la Fraternité Saint-Pierre, de l'Institut du Christ-Roi, de Campos ? Que serait devenue notre chère Fraternité ? On ne dialogue pas, mes frères, avec le modernisme. On lui fait face. On le combat de manière frontale. 

Alors, certes, nous restons excommuniés et schismatiques. Mais excommuniés par qui ? Par un pape qui vante tous les ennemis de la sainte Eglise, qui préside d'indignes cérémonies liturgiques, qui refuse le règne social de Notre-Seigneur, qui détruit l'Eglise avec son œcuménisme libéral, ses initiatives interreligieuses désastreuses, son droit de l'hommisme maçonnique. Non, non, mes frères, nous n'avons rien à voir avec ces gens-là. 

Remercions notre fondateur qui du Ciel où il règne en majesté avec Notre-Seigneur, la Vierge et les saints veille sur nous et nous a donné la force de résister à ce qui aurait été le suicide de la Tradition, de ses écoles, de ses chapelles, de ses prieurés. Comment ne pas voir qu'en cette année où nous fêtons le centenaire de la naissance du nouvel Athanase, du nouveau saint Pie X, du nouveau saint Paul résistant à Pierre Monseigneur a intercédé avec une puissance toute particulière pour que le Saint-Esprit nous éclaire afin de ne pas mettre en danger notre chère Fraternité à qui le Bon Dieu a donné l'Arche d'alliance du Nouveau Testament et qui reste l'instance critique de l'église conciliaire ? Remercions Monseigneur de son intercession, de sa puissance tutélaire. Prions Dieu de nous aider à rester fidèles à son message, à sa voie, à son exemple. Car il y a en chacun de nous un Dom Gérard qui sommeille, un Père Rifan qui nous hante. Il faut lui opposer la force de la prière et de la foi. Soyez vigilants mes frères car, comme le dit l'Apôtre Pierre, le démon comme un lion rugissant rôde autour de vous, cherchant quelqu'un à dévorer ; résistez-lui, forts dans la foi. 

Puisque, comme le disait Mgr Lefebvre, " tous les chaires à Rome sont occupées par des anti-Christ ", puisque, comme Mgr le disait encore " un vrai successeur de Pierre ne peut se donner aux réformes de Vatican II ", nous continuerons fermement et calmement notre combat au service de l'Eglise et de la Tradition. Sans haine mais sans concession. Nous appellerons un chat un chat et un moderniste un apostat doublé d'un traître comme le disait le regretté père Calmel. Etre excommunié par des modernistes, ce n'est pas une source de désolation mais au contraire un motif de gloire. Nous porterons cette sentence injuste, invalide, criminelle comme une palme, comme une décoration. Elle est la preuve que nous sommes dans le bon combat. 

Et puis nous aurons une pensée pour les prêtres et les fidèles, heureusement peu nombreux, qui nous ont quittés et qui ont trahi le bon combat pour céder aux sirènes de la facilité, du confort. Prions pour eux car ils sont en grand danger. Essayez pour ceux que vous connaissez et sur lesquels vous avez quelque influence de les ramener au port de la vérité et à l'unité de la foi au sein de notre chère Fraternité qui, comme le disait Mgr Lefebvre, a les notes d'unité, de sainteté, de catholicité et d'apostolicité alors que l'église conciliaire ne les a évidemment pas, elle qui est œcuménique, pluraliste, démocratique, ouverte à toutes les hérésies et qui ne professe plus la foi des Apôtres. 

Prions pour la conversion du pape et de toute la hiérarchie moderniste du novus ordo.

Prions les uns pour les autres. 

Sanctifions-nous bien en allant seulement aux messes de la Fraternité, dans des centres de la Fraternité, en se confessant seulement à des prêtres estampillés FSSPX. C'est une garantie inégalable. Nous n'avons rien à voir ni avec les ralliés, les messes de l'indult qui sont une insulte comme s'il fallait demander la permission à Dieu pour dire la messe de toujours, la messe canonisée par le saint concile de Trente. Ni avec les ralliés qui sont des traîtres et des lâches, dis-je, mais ni non plus avec les sédévacantistes qui sont des schismatiques puisqu'ils sont coupés de Rome, qu'ils n'en reconnaissent pas l'autorité, la légitimité. Alors que nous, suivant l'exemple de Monseigneur, nous voulons rester romains. Sans Rome et même contre Rome s'il le faut mais romains ! Et nous restons unis au pape même à son corps défendant, à l'insu de son plein gré. Nous continuerons donc à chaque messe à nous dire en communion (una cum) avec Benoît XVI et avec l'évêque diocésain nommé par lui. C'est la seule façon de n'être pas schismatique tout en gardant la Tradition. C'est la voie étroite que nous a apprise notre fondateur et dont, grâce à Dieu, nous n'avons jamais dévié. C'est elle seule qui nous permettra d'aller au Ciel où nous retrouverons Notre-Seigneur, la Sainte Vierge, Saint Joseph, Mgr Lefebvre et tous les saints régnant en gloire et en majesté pour l'éternité. 

Que Dieu et Monseigneur vous gardent, mes biens chers frères, dans la fidélité à Dieu, à l'Eglise et à la Fraternité, seule arche de salut. 

Au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il. 

Edifiant, n'est-ce pas, Victor ? 

Petrus.